C‘est devenu une tradition incontournable, le premier événement de l’année hollywoodienne, c’est la cérémonie des Golden Globes. La 82e a lieu ce dimanche à partir de 17 heures ici, 2 heures du matin en France… Des Globes très français cette année car il n’y a jamais eu autant de nominations frenchies dans toute l’histoire de la cérémonie. Grâce surtout à un film : Emilia Pérez. Le film de Jacques Audiard entre dans la légende des Globes avec dix nominations. C’est une première, jamais un film français n’avait fait aussi bien. Même pas The Artist qui avait récolté six nominations – et c’était déjà remarquable. Mais là, on est dans du très lourd.
Emilia Pérez est nommée dans la catégorie du meilleur film (comédies ou films musicaux), meilleur film étranger, meilleure réalisation et meilleur scénario pour Audiard, meilleure actrice pour Karla Sofía Gascón, meilleur second rôle féminin pour Zoe Saldana et Selena Gomez et trois nominations pour Clément Ducol et Camille – une pour la bande originale du film et deux autres pour les chansons « Mi Camino » et « El Mal ».
Une année record pour le cinéma français
C’est donc énorme pour Emilia Pérez, mais ce n’est pas mal non plus pour The Substance. Cinq nominations pour le film de Coralie Fargeat, meilleur film (comédies ou films musicaux, même si The Substance n’a pas grand-chose d’une comédie ni d’une comédie musicale, mais bon…), meilleur scénario et réalisation pour Coralie Fargeat elle-même, Demi Moore est nommée en meilleure actrice et Margaret Qualley en second rôle féminin.
Sans oublier les coproductions Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau en animation, ainsi que All We Imagine As Light et Je suis toujours là dans la catégorie films étrangers et Timothée Chalamet, après tout à moitié français, nommé en meilleur acteur pour Un parfait inconnu où il incarne un excellent Bob Dylan.
2025 est déjà une année record pour le cinéma français à Hollywood. Une année qui pourrait devenir historique si la razzia des nominations se confirme aux Oscars. Mais ça, c’est une autre histoire. C’est surtout qu’il est bien plus difficile d’obtenir une nomination aux Oscars qu’aux Golden Globes. Les Oscars rassemblent près de 10 000 votants (9 905 pour être précis), tous professionnels du cinéma. Aux Golden Globes, ils sont 334. Ce sont tous des journalistes de cinéma. Enfin, presque.
Il y a à peine trois ans, les vainqueurs des Globes étaient désignés par moins de 80 membres d’une association, la HFPA, Hollywood Foreign Press Association, dont les deux tiers étaient depuis longtemps à la retraite. Une association sous le feu des critiques, et pas loin des cours de justice, pour diverses affaires croquignolesques, allant d’accusations de racisme (il n’y a jamais eu un seul membre noir dans l’association en quelque 80 ans), d’abus de pouvoir sur les journalistes hollywoodiens qui ne faisaient pas partie de leur association (ils faisaient tout, notamment, pour ne jamais laisser certains journalistes entrer dans leurs rangs), de corruption aussi (certains studios savaient comment « sécuriser » les votes de certains membres), sans parler de divers scandales #MeToo qu’on va s’empresser de ne pas vous détailler…
Les Globes étaient donc sérieusement menacés de disparition. Pour les sauver, ils ont été achetés. Les Golden Globes représentent donc aujourd’hui la première cérémonie de récompenses hollywoodiennes qui est aussi une entreprise commerciale.
Todd Boehly, milliardaire aux méthodes « trumpesques », a racheté la marque Golden Globes, il a dissous la HFPA, viré manu militari les membres les plus controversés et ceux qui pourraient l’embêter dans ses affaires futures, embauché les membres restants (des membres salariés dont le boulot principal est de voter pour leurs films et séries préférés, des votants professionnels… Un nouveau concept !) et rajouté environ 300 « sous-membres » qui, eux, ne sont pas payés. Ce sont certes des journalistes sérieux mais ils sont répartis dans le monde. Ce qui défie un peu l’objectif original des Globes qui était de faire juger le cinéma hollywoodien par des journalistes étrangers basés à Hollywood. Mais bon, au moins, ce sont de vrais journalistes…
Golden Globes : la fin des scandales
Donc, oui, ça va mieux, les choix sont moins « extravagants » que dans le passé, il n’y a plus de scandales embarrassants, même s’il reste quelque chose de malaisant là-dedans… Je suis sans doute vieux jeu, mais, à mon sens, les institutions rendant honneur aux arts sous toutes leurs formes, en l’occurrence ici le cinéma et la télévision, devraient toutes rester à but non lucratif. Les Golden Globes mettent en place un dangereux précédent.
Ce soir, sur le tapis rouge, nous aurons droit au défilé habituel de stars, dans une pagaille, quasi traditionnelle, qui fait aussi le charme des Globes. Les premières coupes de champagne accueilleront les invités au bout du tapis. Dans la salle, on battra le record de stars au mètre carré. Les vannes de la présentatrice sur scène, la comique Nikki Glaser, ne seront pas bien méchantes (depuis les années Ricky Gervais, on est bien plus politiquement correct sur la scène des Golden Globes) et les prix défileront. Dans la catégorie comédies et films musicaux, un duel est à prévoir entre Wicked et Emilia Pérez, à moins qu’Anora ne mette tout le monde d’accord.
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Mais, dans les films dramatiques, le résultat semble totalement imprévisible. Aucun favori ne se détache, ce qui laisse toutes leurs chances à mes deux petits chouchous : The Brutalist et 5 septembre sur la prise d’otages des Jeux olympiques de Munich. À moins que Conclave avec Ralph Fiennes…
Il y aura donc du suspense et peut-être des surprises ce dimanche au Beverly Hilton, l’hôtel de Beverly Hills qui accueille la cérémonie, même si on connaît déjà le grand vainqueur de la soirée. Il s’appelle Todd Boehly, l’homme qui possède les Golden Globes.